Le mouvement coopératif en Turquie
La première mise en œuvre des coopératives modernes en Turquie a démarré avec le « Fonds rural » (Memleket Sandigi) (un organe semblable aux coopératives de crédit agricole) établi par l'État en 1863. Toutefois, la première évolution significative est intervenue durant la période républicaine.
Tous les accords juridiques relatifs aux coopératives fixés entre 1920 et 1938 l'ont été sous la présidence d'ATATURK.
Néanmoins, l'une des plus grandes avancées durant la période qui a suivi celle de l'économie planifiée a sans aucun doute été l'inclusion dans la Constitution d'une disposition sur les coopératives. L'article 51 de la Constitution de 1961 comprend la disposition selon laquelle : « Le gouvernement prendra toutes les mesures nécessaires pour améliorer les coopératives », ce qui poussé l'État à être plus actif et responsable dans le développement des coopératives.
Les coopératives ont d'abord vu le jour dans le secteur agricole, pour des raisons d'ordre socio-économique. Plus tard, les coopératives se sont répandues dans d'autres secteurs, tels que le transport, la consommation, la couverture de crédits et plus particulièrement dans le secteur de la construction de logements/lieux de travail en raison des changements intervenus dans le tissu socio-économique et des nouvelles exigences.
Aujourd'hui, il existe 84 232 coopératives de 26 genres différents :
Coopératives de développement agricoles - coopératives d'irrigation - coopératives de pêche - coopératives de planteurs de betteraves - coopératives de crédit agricole - coopératives d’habitation - coopératives d’habitation dans les petites zones industrielles - Coopératives d'espaces de travail partagés - coopératives des ventes agricoles - Coopératives agricoles de vente de tabac - Coopératives des fruits et légumes crus - coopératives de consommateurs - coopératives de transporteurs routiers - coopératives des commerçants et des artisans - coopératives d'artisanat - coopératives d'approvisionnement et de distribution - coopératives du développement touristique - coopératives de la production et de la commercialisation - coopératives de la garantie d’approvisionnement - coopératives de l'édition - coopératives de transporteurs - coopératives de gestion - coopératives d'assurances - coopératives de solidarité - coopératives de formation.
Ces coopératives et leurs activités relèvent du MDC (ministère de la Douane et du Commerce), du MAAE (ministère de l'Alimentation, de l'Agriculture et de l'Élevage) et du MEDU (ministère de l'Environnement et du Développement urbain). Le nombre total des membres de ces coopératives s'élève à 810 922 521.
Source : Stratégie et plan d'action des coopératives turques 2012-2016
Les coopératives en Turquie : Aperçu historique
Avec 8,1 millions de membres, organisés en plus de 84 000 sociétés coopératives qui fonctionnent dans 25 secteurs et sous-secteurs différents, les entreprises coopératives constituent le pilier le plus important de l'économie sociale de Turquie. D'après une récente étude, on dénombrerait 98 688 personnes travaillant directement avec les coopératives. Toutefois, ce chiffre ne comprend que les personnes qui travaillent dans les bureaux des coopératives. Le nombre d'emplois créés par les coopératives est en réalité bien plus élevé. Les coopératives créent de l'emploi au niveau des citoyens, dans les usines de transformation et à différentes étapes du système de la chaîne de valeur. Au vu de la contribution majeure qu'elles apportent à l'économie nationale dans les zones rurales et urbaines, les coopératives sont considérées comme l'un des moteurs de l'économie sociale.
L'histoire du mouvement coopératif en Turquie remonte à 1860, durant l'ère de l'Empire ottoman, lors de laquelle furent créés les dénommés « fonds de crédit ruraux » qui ont donné lieu à la première phase de création de ce qu'on appelle aujourd'hui les coopératives agricoles. Durant les premières années de la République de Turquie, dans les années 1930, les coopératives de crédits agricoles et de ventes agricoles ont été créées. À partir des années 1950, d'autres types de coopératives ont commencé à émerger dans les secteurs de l’habitation, de la consommation, de l'artisanat et du transport. Dans les années 1960, les salariés des régions industrialisées et urbaines, en particulier, étaient invités à s'organiser en coopératives de consommation et d’habitation. Le Syndicat national des coopératives de Turquie (SNCT) a été créé en 1990 et est une organisation parapluie. Aujourd'hui, le SNCT couvre les secteurs coopératifs les plus importants et représente plus de 6 millions de membres du secteur coopératif.
Il existe actuellement en Turquie trois lois régissant les coopératives :
1. Loi générale sur les coopératives No 1163 de 1969 (pour les coopératives agricoles et non-agricoles, à l'exception des coopératives indiquées ci-après)
2. Loi No 1581 de 1972 (pour les coopératives de crédit agricole et leurs syndicats)
3. Loi No. 4572 de 2000 (pour les coopératives agricoles de ventes agricoles et leurs syndicats).
Un schéma synthétique du mouvement par secteur est indiqué ci-dessous pour mettre en lumière son importance dans la vie socio-économique turque.
ACoopératives de crédit agricole (CCA)
ECréée sur la base du modèle d'organisation des Coopératives Raiffeisen en Allemagne, la CCA est le groupe coopératif le plus ancien de Turquie, et le plus important du point de vue économique. Le groupe compte 1,3 million d'agriculteurs membres, organisés en 1659 sociétés CCA, affiliées à 16 syndicats régionaux et à un syndicat central à Ankara. Le groupe emploie 6 000 travailleurs et professionnels. Si sa première fonction est la distribution de crédit agricole, il propose néanmoins des services complémentaires et est devenu un système coopératif multi-usages. La CCA détient et gère seize usines de production et de transformation spécialisées, notamment dans les engrais chimiques, ce qui en fait le plus grand distributeur d'engrais chimiques, avec 84 % des parts de la plus grande usine d'engrais (GUBRETAS), mais également dans les semences (via sa propre entreprise TAREKS), dans l'alimentation pour animaux (via 7 usines de production d'alimentation pour animaux), dans les insecticides agricoles et dans les machines et outils agricoles. Le groupe est également actionnaire et agent général de l'une des plus grandes compagnies d'assurance. C'est par ce biais qu'il fournit des services d'assurance agricole à ses membres et à leurs produits. En 2010, la CCA a également distribué de l'alimentation pour animaux à hauteur de 410 millions de dollars US, des semences à hauteur de 171 millions de dollars US, de l'essence pour un total de 209 millions de dollars US et des biens de consommation à concurrence de 90 millions de dollars US.[i] L'ACC détient un total de 303 millions de dollars US en capital issu des cotisations des membres entièrement libérées. Fin 2012, le montant total de crédit agricole accordé à ses membres s'élevait à 7,8 milliards de dollars US, soit 19 % du montant total de crédits agricoles accordés (deuxième derrière le plus grand distributeur, la Banque agricole, avec 40 %). EN 2012, elle a distribué plus d'un million de tonnes d'engrais chimiques. En 2010, la CCA a également distribué de l'alimentation pour animaux à hauteur de 410 millions de dollars US, des semences à hauteur de 171 millions de dollars US, de l'essence pour un total de 209 millions de dollars US et des biens de consommation à concurrence de 90 millions de dollars US.[ii]
ACoopératives agricoles de vente (CAV)
ALes CAV représentent 602 248 membres organisés en 322 sociétés coopératives primaires affiliées à 17 associations coopératives de produits de base et spécialisés. Ces coopératives et leurs associations emploient environ 7 000 membres. Les CAV travaillent dans l'achat, la transformation et la vente de 21 produits agricoles différents, dont la plupart sont considérés comme stratégiquement importants pour l'économie du pays. Parmi ces produits, on trouve le coton, la noisette, l'arachide, les olives et l'huile d'olive, les figues, le raisin, les haricots, les céréales, l'huile de tournesol, les vers à soie, la laine, les roses, les fruits et les légumes frais, etc. Malgré les difficultés financières rencontrées depuis quelques années et grâce au processus de restructuration de longue haleine qui est en cours, les CAV demeurent fortes économiquement et détiennent près de 100 % des parts du marché dans l'achat et la transformation de la majorité des produits susmentionnés dans leurs régions.[i]
SCoopératives de la production de betteraves sucrières (PANKOBIRLIK)
OPlus d'1,6 million de producteurs de betteraves sucrières se sont organisés en 31 entreprises coopératives primaires affiliées à l'Union des coopératives de producteurs de betteraves, PANKOBIRLIK. Ces coopératives détiennent 6 usines de production de sucre et 18 entreprises spécialisées. Voici ci-après les indicateurs économiques majeurs relatifs aux coopératives de betteraves sucrières:[ii]
- 42 % de la production sucrière du pays ;
- 802 millions de dollars US de capital libéré ;
- 7 300 employés.
- 165 millions de dollars US de crédit à la production distribué aux membres ; et
- Volume d'activité à 3, 5milliards de dollars US.
Autres coopératives agricoles
Il existe d'autres types de coopératives agricoles dont voici les chiffres et le nombre d'affiliés :[iii]
- Coopératives de développement rural (village) : Total de 842 563 membres organisés en 8173 sociétés coopératives affiliées à 82 associations et 4 associations centrales. Parmi celles-ci, on trouve des coopératives spécialisées, tels que les coopératives forestières (sous OR-KOOP), les coopératives laitières, les coopératives d'artisans, etc.
- Coopératives d'irrigation : Total de 95 984 membres organisés en 2497 coopératives affiliées à 13 associations régionales et à une association centrale.
- Coopératives de pêche : Total de 29 972 membres organisés en 522 coopératives affiliées à 14 associations régionales et à une association centrale.
Coopératives d’habitation (HC)
Du point de vue du nombre de coopératives et de membres, les coopératives d’habitation constituent le plus grand segment du mouvement coopératif, avec un total de 54 996 coopératives et 1 985 076 membres. Toutefois, on ne sait pas combien de ces coopératives sont encore actives et combien sont dormantes ni combien ont déjà achevé leur mission, mais n'ont pas encore décidé de se dissoudre. Il convient également de souligner que bon nombre de ces coopératives et syndicats partagent des liens étroits et solides grâce à la concertation entre les membres des associations de l'ensemble des coopératives d’habitation. Par exemple, l'un des projets les plus fructueux menés par des coopératives de logement pour un total de 35 000 logements, le projet KENT-KOOP, a été mis sur pied principalement par des coopératives de logement détenues par des ouvriers et soutenues par des syndicats. La part de coopératives dans le secteur de la construction de logements a atteint les 36 % dans les années 1980 et 1990 grâce à l'accès aisé au crédit logement de masse. Ce taux a considérablement diminué ces dernières années, en particulier après l'an 2000, et ne s'élève plus qu'à 6,8 %.[1], Cette réduction est principalement due à l'introduction de politiques centralisées et non compétitives sur le marché du logement.
Coopératives de garantie et de crédit artisanaux (TESKOMB)
Ces coopératives sont montées par des petits artisans et commerçants (petits entrepreneurs) qui travaillent seuls pour la plupart dans le but d'obtenir un prêt garanti, principalement auprès de la Banque populaire de Turquie (HALBANK). Il y a actuellement 993 coopératives qui comptent au total 685 105 membres, affiliées à 32 associations régionales et à une association centrale à Ankara, TESKOMB. Une entreprise de services, ESGIMTAS, a été créée par TESKOMB pour fournir des services de soutien aux sociétés coopératives primaires.[2] Actuellement, le montant total des crédits de TESKOMB avoisine les 5 millions de dollars US, dont 50 % du financement est assuré par l'État en intérêts.
Coopératives de transport
Il s'agit là d'un autre type de coopératives très répandu en Turquie. Il existe actuellement 6 734 coopératives de transport qui comptent un total de 288 063 membres, dont la plupart sont des chauffeurs de bus, de minibus et de camions, affiliés à 42 associations régionales et à une association centrale
Source : Réaction des coopératives face au chômage dans les zones rurales et urbaines de Turquie
(extrait de l'article présenté lors du Sommet international des coopératives à Québec, au Canada, du 6 au 9 octobre 2014, par Hüseyin Polat, Conseiller principal auprès du Syndicat national des coopératives de Turquie (SNCT).
[1] Strateji Belgesi, 2012. (Turkish Cooperative Strategy Paper), page 16.
[i] Koop Strateji Belgesi, GTB, 2012. (Cooperative Strategy Document, Ministry of Customs and Trade)
[iii] Koop Strateji Belgesi, GTB, 2012
[i] TKK İstatistikleri 2012 (Statistics of Agricultural Credit Co-ops, 2012)
[ii] TKK İstatistikleri 2012 (Statistics of Agricultural Credit Co-ops, 2012)